dimanche 9 janvier 2005

Final countdown

Demain et une semaine plus tard, à cette heure, je serai probablement déjà seul dans mon appartement. Cette réalité me terrifie.

Les derniers jours ont été très mouvementés, dans mon âme, ma tête, mon corps.

Jeudi nous avons descendu mon fauteuil électrique en ville. Le voilà enfin à l'appart, dispo pour les essais pratiques après toutes ces théories compliquées que mon cerveau hésitant avaient échafaudées. Pour la première fois de ma vie j'ai pris un ascenceur seul. Et avant ça j'ai du réaliser une manoeuvre infernale pour éviter une voiture qui sortait de la cour par le porche d'entrée plutôt étroit. P. et D. étaient déjà montés avec la chaise manuelle et les outils. Petit flip, mais j'y suis arrivé. En rentrant seul pour la première fois dans l'appart, il a évidemment fallu que j'arrive à cogner le chambranle. Et quelques minutes plus tard, à déjà faire un coup dans le frigo. Pas évident de se piloter au joystick ailleurs que dans Megaman.

Vendredi je suis parti en quête des matériaux nécessaires à la fabrication de mon coin cuisine adapté à ma chaise avec P.. Finalement les suédois en jaune et bleu avaient un début de solution (pas volontairement je vous rassure) avec deux petits meubles de 70cm de haut qui vont servir à soutenir le plan de travail. Achat de vis, chevilles, évier, planche et panneau de bois pour finaliser ce support. P. devra aller chercher le plan de travail sans moi, pas moyen de me caser avec ma chaise dans sa camionette avec une planche de 2m36. J'ai passé une bonne partie de la journée à l'attendre pendant qu'il fouinait dans divers magasins de bricolage, à grelotter à cause de la faim, du froid, et surtout de l'anxiété permanente qui me ronge maintenant. Je commence à réaliser le risque, les implications. Je pense à Y., seule chez elle. Je me demande quand je vais enfin trouver quelqu'un pour m'accompagner chez mon grand-père afin de lui annoncer la nouvelle. 1001 questions me taraudent, et j'essaye de ne pas y penser. Mais quand on est seul dans le noir et le froid, et qu'on ne peut pas fumer dans la voiture, on ne peut s'empêcher de laisser vagabonder son esprit. Moments difficiles. Suite des opérations dans une soirée mi-délire mi-gravité avec Brigde, l'Elu et sa compagne pour le début de l'empaquetage. A 1h du mat, le plus gros était emballé dans des caisses. Il restera un petit boulot de tri lors de la mise en bibliothèque des tous ces livres, CDs et DVDs, mais le plus gros est fait. Un voile diaphane de poussière plane dans le bureau, et la fatigue s'empare de moi. Dodo, il est temps.

Hier, ultime assaut contre les surconsuméristes scandinaves pour tout le nécessaire de bivouac. Couette, oreillers, draps, essuies, ustensiles de cuisine de base, et tutti quanti. Je ne pourrai jamais assez remercier M. pour son dévouement et son engouement à se ballader dans les rayons avec moi surchargé de brols en tout genre, au milieu de tous les autres crétins comme moi victimes de la simplicité apparente de ce temple suédois. Jamais je n'aurais pu faire cela sans une fille qui a la patience de regarder tous les modèles de tire-bouchons, toutes les couleurs de couvre-lit pour voir si ça va avec le reste, tous les modèles de lampe pour trouver celui en plastique qui ressemble à celui en verre mais qui est 4 fois moins cher, et qui est même capable d'inspecter 14 paniers en osier pour trouver les 6 parfaits dans le lot. J'ai failli oublier le trajet aller à pied dans la bise à 100 km/h de face, avec la pluie cristalline qui nous fouettait le visage, les mains douloureuses, et le froid paralysant. Note pour plus tard : si un jour j'ouvre un centre pour les enfants qui lisent pas génial comme Derek, ne pas oublier de remplacer la statue représentant la bataille d'essence par une statue représentant M. avec un sachet Ikea rempli et P. avec un marteau.

De retour à l'appart avec notre butin accompagnés de D. et V. qui avaient à leur tour affronté les éléments sur le parking géant pour venir nous récupérer, je change de chaise et me revoilà libre de mes mouvements. Après un rangeage express, me voici à la porte d'entrée du complexe de studios avec M. pour ma première sortie avec le fauteuil électrique en ville. Misère. Quelle frousse. Pourtant, le ciel avait l'air de vouloir m'aider, le vent avait fait disparaître toute forme d'intempérie comme pour me chuchotter "allez, vas-y, lance-toi". Et je l'ai fait. Première traversée de rue. Premiers trottoirs (heureusement adaptés). Premier calcul d'itinéraire pour trouver les endroits accessibles. Premières inconsciences dues à l'impatience de ces feux de signalisation toujours trop rouges. Premiers slaloms dans la foule qui ne regarde jamais où elle va, comme si tout l'intérêt d'une ballade en ville était de scruter les pignons des maisons. Nouvel accrochage dans l'ascenceur du magasin d'électroménager, heureusement sans trop de conséquences. Premier Macdo à la saveur de liberté, seul perdu dans mon grand siège Recaro. M. a du me laisser pour refaire son heure de bus pour rentrer chez elle, L. prend le relai de justesse. Retour à l'appart dans la nuit, avec un peu plus d'assurance. Après un bref moment à lui raconter mes épiques aventures, P. vient me rechercher pour me ramener chez Y.. Pourtant, je serais bien resté chez moi ce soir...

Je me sens parfois ridicule de faire de banalités (voire futilités) pareilles des aventures dignes du Baron Münchhausen. Mais c'est ma nouvelle vie. Remplie de nouveaux défis, de nouveaux frissons, de nouveaux bonheurs. Et pour le moment, même si j'en bave pas mal, savoir que je ne serai jamais seul continue de me donner l'énergie nécessaire à provoquer ce changement radical dans mon existence. La vie est fantastique, il ne faut jamais l'oublier...

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Space Oddity

This is Major Tom to ground control I’ve left forevermore And I’m floating in most peculiar way And the stars look very different today  ...